Gardian
Le gardian est le gardien d'une manade camarguaise ou troupe de taureaux ou de chevaux élevée en semi-liberté et appartenant à un manadier.
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Le gardian (du provençal gardian, littéralement «gardien») est le gardien d'une manade camarguaise ou troupe de taureaux ou de chevaux élevée en semi-liberté et appartenant à un manadier[1]. Pour le Code du travail, le gardian est un ouvrier agricole. Dans le monde rural de la France du XIXe siècle, c'est le bouvier de Camargue.
Avant le XXe siècle, les gardians ont une tenue adaptée à leur travail ainsi qu'à la saison ; l'outil des gardians à pied est le bâton, celui des gardians montés est le trident ; leur habitation la cabane en roseaux. Ils sont fréquemment en sabots.
Origine et vogue du terme
La popularisation du terme provençal gardian est liée à la folklorisation qu'a connue ce métier au cours du XXe siècle. Certaines cartes postales des années 1900 emploient le terme français «gardien» dans leur légende : «Le Capitaine des Gardiens Raynaud» ou encore «Le gardien BICHETTE de la Manade Combet» entre autres exemples.
Remarque : le féminin de gardian, «gardiane», sert à désigner une cavalière posant au gardian dans certaines cartes postales anciennes[2]. Le diminutif «gardianette» (francisation du provençal gardianeto) existe aussi[3].
Le statut social
Au XIXe siècle et au tout début du XXe, le gardian ou bouvier est un ouvrier agricole occupant le bas de l'échelle sociale du monde rural camarguais. Il appartient à la masse des manouvriers qui louent leurs bras dans les campagnes françaises. Il est attaché à un domaine, le mas, et travaille sous les ordres d'un régisseur ou baile-gardian, sinon du maître lui-même (le pelot ou mèstre). Il n'est propriétaire ni de son cheval (lorsque on lui en confie un), ni de sa cabane (construite par un artisan sur les instructions du maître). Son rôle principal est de garder les bious ou taureaux quand ils se sustentent, ce qu'il fait à pied et avec un bâton court (le calos) le plus souvent en frêne[4], ou de trier le bétail, ce qu'il fait à cheval et avec une pique terminée par un trident (ficheiroun[5]). Pour cette raison, il est fréquemment nommé gardo-bèsti («garde-bêtes»). Une besace (ou brasso) lui permet de emporter sur son lieu de travail repas, boisson ou divers objets dont il a besoin.
La tenue
Avant normalisation


Si la Confrérie des gardians existe depuis 1513, l'habit de ces derniers est de création particulièrement récente. Au début du XXe siècle, «le gardian de Provence n'a pas de tenue spécifique au métier», note Carle Naudot en 1945. Des photos du début du XXe siècle montrent des gardians en sabots et casquette qui ressemblent davantage à des ouvriers agricoles qu'à des cowboys de l'Ouest américain.
Après normalisation
- «Nous nous vêtirons à la mode gardiane», Rul d'Elly, Chant de guerre
C'est le Marquis de Baroncelli, promoteur du folklore camarguais dans la première moitié du XXe siècle[6], qui impose aux gardians amateurs un costume bien précis, pour donner plus d'unité et d'allure à leur troupe lors des fêtes gardianes[7]. Ce costume comprend une veste de velours noir à soutaches[8], un pantalon en tissu «peau de taupe» avec liseré noir, une chemise imprimée de couleurs vives, une ceinture (taiolo ou taillole), un grand chapeau de feutre noir (valergo ou valergue[9]), une cravate (régate).
Le cavalier porte des jambières ou gamaches en étoffe de laine à carreaux, permettant du protéger de la rosée ou mouillure du matin.
La monture
La race
Même le type de monture est spécifié : un cheval de race Camargue seulement. En croupe, pour les fêtes, une jeune Arlésienne coiffée.
Cette folklorisation continue aujourd'hui : le 17 avril 2008, une charte a été signée au Parc naturel régional de Camargue sur la tenue des cavaliers et de leurs chevaux, prévoyant surtout de «privilégier au maximum les chevaux de type Camargue, au détriment de races nettement moins représentatives de Camargue. Les chevaux de couleur n'entrant pas dans le type devront être écartés, tout comme les chevaux ressemblant TROP à des chevaux de trait pour le devant d'abrivado[10]».
Le harnachement
L'outil de travail principal du gardian est ficheiroun ou trident de fer, longue gaule de frêne ou de châtaignier armée d'une douille conique en fer terminée par trois pointes. C'est avec cet instrument que le bouvier se fait obéir du taureau, surtout lors du triage du bétail.
Un autre outil est le seden, corde tressée avec du crin de jument et servant de lasso pour capturer le cheval dans la manade et de licol pour l'attacher.
La selle camarguaise, différente de sa cousine anglaise, comporte un troussequin élevé en forme de dossier et un pommeau aussi élevé.
Les étriers du gardian sont en forme de cage car quand le gardian n'était qu'un paysan il portait des sabots et la cage servait a ce que le sabot puisse rentrer à l'intérieur mais elle sert aussi pour que le cavalier, en cas de chute, ne reste pas accroché et se dégage aisément.
La cabane
Avant le XXe siècle


Héritières des premières cabanes d'habitation apparues au XVIe siècle[11]en Camargue et apparentées aux cabanes de roseaux qui parsemaient au XIXe siècle le littoral languedocien et roussillonnais, les cabanes de gardians étaient construites avec matériaux végétaux disponibles localement, et ce seulement pour des raisons de coût. Les matériaux nobles, acheminés depuis les régions limitrophes, étaient réservés à la construction des mas[12].
Des cabanes peu différentes servaient d'habitations permanentes ou saisonnières aux pêcheurs, bergers, agriculteurs, vanniers, sauniers qui travaillaient en Camargue. De celles-là, il ne reste que quelques clichés : le détail de leur architecture et leur nomenclature terminologique est perdu.
Au début du XXe siècle
La cabane de gardian du début du XXe siècle est un bâtiment à façade en pignon, à la toiture à deux versants inclinés de 45%, dont la partie exposée au mistral est en abside ainsi qu'à croupe de manière à donner le moins de prise envisageable à ce dernier.
Elle possède une armature de piquets verticaux en bois d'ormeau supportant des pannes sablières (areniés). Sur ces dernières, s'appuient les chevrons (travetos ou travettes), lesquels reposent en haut sur la panne faîtière (arenié mestre). Quand le pignon est en matériaux végétaux, la faîtière est soutenue par deux poteaux montant de fond, l'un à l'avant, l'autre à l'arrière; quand le pignon est en pierres maçonnées, elle repose à l'apex de ce dernier et sur un poteau de fond à l'arrière.
Le chevron central de la croupe dépasse toujours le faîte de la toiture pour se retrouver coiffé d'une corne (bano) ou barré transversalement en forme de croix. Par grand vent, pour éviter que la cabane ne se soulève, on attachait au bout saillant de ce chevron, des cordes fixées au sol.
La couverture est faite de rangées de javelles (manouns ou manons) de roseau des marais (sagno ou sagne) posés sur des lattes (coundorsos ou condorses). Pour obtenir une meilleure étanchéité, une rangée de tuiles canal scellées au mortier vient fréquemment coiffer le faîtage, et un enduit de mortier à la chaux (cacho-faio) est appliqué le long de ce dernier, formant une chemise (camiso) ou chape. Celle-ci a aussi comme avantages de réfléchir, par sa blancheur, les rayons du soleil, de protéger du vent le sommet de la toiture en le caparaçonnant et de diminuer les risques d'incendie liés à la présence du conduit de cheminée.
Les ouvertures sont étroites et il n'y a pas de fenêtre au nord. L'entrée est toujours en pignon. La porte en est en bois. Une toile contre le soleil et les moustiques est suspendue au-dessus du linteau en été.
La cabane occupe une surface de 80 à 120 m2 en moyenne.
Quand le pignon est en dur, une cheminée à hotte montante est adossée contre la paroi intérieure de ce dernier, et sous l'un des rampants, l'autre moitié du pignon étant prise par l'entrée. La souche de cheminée, le plus souvent de section rectangulaire, dépasse toujours du rampant opposé à celui au-dessus de l'entrée.
La cabane s'allonge suivant les besoins de l'habitant : soit pièce unique, l'occupant mangeant au mas, soit pièce à vivre et chambre. La chambre, scindée de la pièce principale, au mieux par un cloison, au pire par un simple rideau de tissu, occupe alors la partie arrondie ou culotte de l'édifice. Elle abrite un lit en forme de caisse, dit brèsso (fém. ), sur lequel pose en guise de matelas un sac à sel de 50 kilos rempli d'herbes sèches, dites baunco. La pièce à vivre, pour sa part, est meublée simplement : une table, deux bancs, quelques étagères et coffres. En pignon, un auvent (laùpio, fém. ), armature rudimentaire coiffée de sagne, complétée par une table et un banc en bois, sert aux tâches ménagères (préparation de la cuisine, vaisselle).
Le sol de la cabane est en terre battue ou en béton de terre (bétun), mélange de mortier de chaux et d'agrégats roulés.
Devant certaines cabanes, se dresse un poteau pourvu d'échelons, nommé escalassoun (échelier[13] ou rancher[14]), auquel le gardian est censé monter pour surveiller son troupeau.
Aujourd'hui


Il n'existe plus actuellement d'anciennes cabanes de gardians en dehors de celle qui a été remontée au Musée Arlaten à Arles (Bouches-du-Rhône). Aux Saintes-Maries-de-la-Mer, les cabanes des gardians du mas de l'Amarée, popularisées par les cartes postales de la première moitié du XXe siècle, ont été rasées[15]. De même, celles du mas du Simbèu, construites vers 1930, ont été détruites une douzaine d'années plus tard par l'armée allemande[16].
Les cabanes visibles aujourd'hui aux Saintes-Maries-de-la-Mer sont des variantes modernisées des cabanes à pignon en dur de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, surtout la trentaine qui sont visibles entre le front de mer et l'étang des Launes, bâties par les derniers maîtres cabaniers dans les années 1950-1960 à l'initiative du maire de l'époque, Roger Delagnes[17].
Construites en matériaux modernes (à l'exception du matériau de couverture), les cabanes du milieu du XXe siècle sont assises sur des fondations et la chemise de leur faîtage est réalisée en ciment sur du grillage[18]. La structure porteuse est constituée non plus par des poteaux de fond positionnés dans l'axe du bâtiment mais par des fermes triangulées reposant sur les murs gouttereaux. Si on ne peut plus parler d'«authenticité» ni de «respect des techniques anciennes» à leur sujet, ces cabanes modernes permettent cependant à la forme ainsi qu'à l'image de la cabane de gardian de perdurer dans le paysage et les esprits.
Avec leurs murs en maçonnerie blanchis au lait de chaux, leur pignon aux rampants saillants, leurs larges baies (en pignon, sur les côtés et même quelquefois dans l'abside), et tout le confort moderne, certaines cabanes modernes servent de résidences secondaires, de gîtes, de chambres d'hôtel, de restaurants, etc., pour les touristes et les vacanciers.
Le métier
Il existe actuellement des gardians professionnels et des gardians amateurs[19] :
- les premiers sont des salariés regroupés au sein de l'Association des gardians professionnels de taureaux et toros de Provence et de Languedoc ;
- les seconds sont des bénévoles, regroupés pour la majorité dans l'Association des gardians non salariés.
Le gardianage
La muselade
Introduction d'une muselière, petite pièce de bois plate et allongée, dans le cartilage du nez du veau d'un an, pour l'empêcher de têter et ainsi le sevrer.
La ferrade
Application au fer rouge de la marque de la manade sur la cuisse gauche du bouvillion d'un an.
Le triage
Le matin d'une course ou d'une ferrade, rassemblement et enfermement des bêtes de la manade dans un enclos pour les trier.
Le bistournage
Castration des jeunes taureaux pour les rendre moins agressifs et plus aptes à la course camarguaise.
L'engasade
Immersion des troupeaux lors de la traversée du Rhône ou d'un marais.
L'abrivade
Au départ, traversée au galop des taureaux de la course jusqu'aux arènes, encadrés par des gardians à cheval disposés en V.
La course de taureaux
Les jeux gardians
Il existe aussi des jeux de gardian comprenant, entre autres :
- le saut de cheval à cheval : le gardian saute sur un autre cheval qui n'est pas sellé.
- le saut de cheval à taureau : le gardian saute sur le taureau.


Notes et références
- La manade est aussi le lieu où pâture le troupeau de taureaux ou de chevaux.
- Outre un plat typiquement camarguais à base de viande de taureau marinée.
- Cf la carte postale «EN PROVENCE - Gardians et Gardianettes des Saintes-Maries-de-la-Mer aux Fêtes Provençales», éditée entre 1915 et 1925.
- On parle alors de «garde faite à bâton planté».
- C'est une hampe de frêne ou de châtaignier, de 2, 20 m à 2, 50 m de long et terminée par une pièce en fer forgé ou ferri à trois pics.
- Sur le rôle de Folco de Baroncelli dans l'invention des traditions gardianes, cf. Robert Zaretsy, Cock and Bull Stories : Folco de Baroncelli or the invention of the Camargue, University of Nebraska Press, 2004 ; citation : «Just as the political and intellectual elite of the Third Republic "invented" a certain kind of France, so too did a coterie of southern writers, including Baroncelli, "invent" a certain kind of Camargue. Baroncelli recast the Camargue as "le far-west" of France, creating the "immemorial" tradition he battled to protect».
- Folco de Baroncelli se serait inspiré soit de la veste russe de son ami Pranishnikoff - velours, passepoilée, revers de soie rouge -, soit de la veste noire portée par un certain M. Larnac lors de parties de chasse.
- Une soutache est un galon permettant de cacher les coutures d'un vêtement.
- Chapeau en feutre, à larges bords, porté pour se prémunir d'une insolation ; popularisé par Frédéric Mistral ; il était fabriqué à Lunel dans l'Hérault.
- «Le bon habit fait le vrai gardian», La Provence, 20 avril 2008.
- Une carte ancienne du sud-est de la Camargue en 1534 montre, à l'une des embouchures du Rhône, un groupement de cabanes dont certaines sont en longueur (à l'instar des cabanes de la première moitié du XXe siècle) alors que d'autres sont rondes avec un toit pointu en végétaux [1].
- Le mas camarguais est pour sa part construit en dur.
- Échelle à un seul montant central.
- Échelle constituée d'une seule poutre sur laquelle sont disposées les ranches (les échelons) perpendiculairemebt de part et d'autre.
- Le relevé en plan et coupes de la plus petite des deux cabanes a été publié dans le volume Provence du Corpus de l'architecture rurale française en 1980.
- Christian Lassure, L'évolution de la cabane camarguaise au XXe siècle selon des cartes postales et photos anciennes, III, Les cabanes du premier mas du Simbèu aux Saintes-Maries-de-la-Mer, 6 septembre 2008.
- Christian Lassure, op. cit., X, Cabanes du front de mer aux Saintes-Maries-de-la-Mer, 26 janvier 2009.
- Détails consignés dans le dossier Du roseau à la cabane édité par le Parc naturel régional de Camargue (mise à jour janvier 2007).
- Cf. Le Vade Mecum du voyageur en Camargue, rubrique «gardian».
Bibliographie
- Mme Louis Figuier (née Juliette Bouscaren), Le gardian de la Camargue - Mos de Lavêne, coll. «Auteurs célèbres», C. Marpon et E. Flammarion, Paris, 1889, 249 p.
- Pierre Lanéry d'Arc, Les maisons-types de la Provence, chap. 35 de Enquête sur les conditions de l'habitation en France. Les maisons-types, t. 1, Ministère de l'instruction publique, Ernest Leroux, Paris, 1894, pp. 207-248.
- de) Flandresy Jeanne, Charles-Roux Jules, Mellier Etienne, Le livre d'or de la Camargue, tome I, Le pays; les mas et les châteaux; le Rhône camarguais, Librairie A. Lemerre, Paris, 1916, 437 p.
- Fernand Benoit, Les chaumières à abside de la Camargue : la cabane, origine, description, mode de construction, dans Revue du folklore français, t. 9, 1938, No 2, avril-juin, pp. 51-53, pl. h. t.
- Fernand Benoit, Les coutumes, l'habitation et les fêtes [en Camargue], dans Le Chêne, numéro spécial, No 16, 1938, pp. 100-112.
- (d') Elly Rul, La Camargue gardiane, Michel Delaveau, Paris, 1938, 165 p.
- Carle Naudot, Ethnographie du pays d'Arles. Contribution au folklore de Camargue, Le Seden, 1947.
- Henri Marc, Carle Naudot, Victor Quenin, Terre de camargue - Terro Camarguenco, Arthaud, Grenoble-Paris, 1948, 159 p.
- Jean-Luc Massot, Maisons rurales et vie paysanne en Provence, Serg, 1975.
- René Baranger, En Camargue avec Baroncelli, l'auteur, Clichy, 1983, 164 p.
- Guy Châtel, La selle gardiane et le harnachement camarguais, dans Courrier du Parc, No 45-46, 1995.
Liens externes
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